Pour des forages géothermiques au lieu des forages pétroliers!

En 1911 les Italiens démarraient la première centrale géothermique a Valle des Diavolo. Depuis lors, pas grand chose si on compare avec l’évolution des autres technologies de production d’énergie. Pourtant le noyau terrestre et ses 6 000°C résultant de la désintégration d’éléments radioactifs réchauffe le manteau et une partie de l’écorce terrestre, et peut tout à fait se capter à grande échelle par des installations de géothermie profonde à haute température.

Selon Craig Dunn de la société Borealis GeoPower, le premier % de l’épaisseur de notre planète recèle en chaleur de quoi alimenter une civilisation comme la nôtre pendant 6 milliards d’années. Pourtant la géothermie ne compte encore que pour 0,3% environ de la production d’énergie électrique globale.

Un projet profond existe en France depuis la fin des années 80, le projet Enhanced Geothermal System de Soultz-Sous-Forêts (EGS Soultz pour les intimes). Un double puits de 5000 mètres de fond permet de de faire circuler de l’eau entre la surface et la roche profonde naturellement chauffée à 200°C. La vapeur ainsi générée permet de générer 1,5 MW, suiffant pour un village 1 500 habitants (selon ce blog).  Le projet prévoit de passer à une installation de 25 MW. Cette vidéo présente le principe:

les ressources EGS en Europe

les températuresTechniquement, l’exercice de forage est difficile et il faut choisir des zones propices. La carte ci-jointe présente les zones géothermiques en Europe. En ce qui concerne la France, la partie Est n’est pas mal lotie avec une région particulièrement propice en PACA et Massif Central. Le record de forage actuel est détenu par les Russes avec un puits de 12 km sous la péninsule de Kola. Dans tous les cas, on ne sait jamais si on va tomber sur un “gisement” exploitable avant d’avoir foré, ce qui coûte cher: des millions d’euros pour forer un puits plusieurs kilomètres, et il faut au moins 5 puits par zone pour garantir son exploitabilité. Il faut également prendre en compte l’ensembles de problèmes associés à cette technologie: traversée de la nappe phréatique, micro-tremblements de terre associés à la contraction des roches chaudes (dont une partie des calories est prélevée par le processus de génération d’énergie).

Début juin se tenait au Canada la rencontre Equinox Summit:Energy 2030. La présentation PDF du communiqué final est disponible ici. Les experts prévoient que la géothermie, toutes technologies confondues, comptera pour 10% de la production électrique de base d’ici 2030, à condition d’investir un milliard de dollars dans dix à vingt projets dans les quelques années à venir.

Au vu de la situation de plus en plus alarmante de l’état du parc nucléaire (sans même parler de Fukushima) et des risques liés au forages pétroliers profond (n’oublions pas BP et le Golfe du Mexique),  est-il permit d’espérer que les pouvoirs publics, s’il en reste encore des éléments non corrompus par les intérêts particuliers que l’on sait, adressent sérieusement la question de la génération géothermique de base?

 

A propos Vincent Verschoore

Animateur de Ze Rhubarbe Blog depuis 2008.

11 réponses

  1. Jibrail

    Merci pour ces infos. Il ne faut pas sous-estimer non plus les risques liés à cette technologie, comme vous le mentionnez; j’ai deux contre-exemples assez malheureux près d’où j’habite :

    – A Staufen, petite bourgade allemande au pied de la Forêt-Noire (et à une quinzaine de kilomètres de Fessenheim…), un forage géothermique a provoqué un désordre du sous-sol qui s’est traduit par un soulèvement du sol et des dégâts dans l’ensemble du centre ancien, sur des dizaines de maisons; il y aurait aujourd’hui pour 40 à 50 millions de dégâts. Apparemment, c’est une couche de gypse qui aurait gonflé suite aux infiltrations d’eau par le forage.
    http://www.arte.tv/fr/1755842,CmC=2786544.html

    – Un peu plus au sud, un projet de géothermie profonde à Bâle, en Suisse, a provoqué une série de mini-séismes qui ont conduit au gel du projet. Il faut dire que la ville de Bâle se situe exactement sur une faille sismique.
    http://www.rfi.fr/actufr/articles/085/article_49140.asp

    Si la géothermie reste intéressante, il faudra aussi des gens sérieux et non guidés par le profit pour en porter les projets !

  2. Vincent Verschoore

    Merci beaucoup pour ces précisions! On en est encore aux balbutiements en géothermie profonde. Mais on peut aussi viser une géothermie moyenne, à faible profondeur mais suffisante pour le chauffage urbain par exemple.

  3. Anonymous

    Toute cette énergie qui se trouve là, sous nos pieds, inépuisable, propre, pratiquement prête à l’emploi, dont une quantité colossale se dégage à chaque éruption volcanique et dont il suffirait de savoir récupérer une infime partie pour nous affranchir de toutes les centrales nucléaires et de toutes les éoliennes et autres centrales ou panneaux solaires chers, inefficients et encombrants.

  4. Stéphane Simon

    C’est justement pour fédérer l’ensemble des acteurs de la filière géothermique et former et faire e rencontrer professionnels et porteurs de projets que sont organisées les 1ères Journées de la GEOTHERMIE les 13,14 et 15 décembre prochains au Parc Floral de Paris.

    Les inscriptions aux conférences sont éligibles au budget formation.

    http://www.journeesgeothermie.com

    Quelques sessions et retour d’expériences seront notamment dédiés à la géothermie haute énergie (Soultz, projet Roquette)

  5. dawei

    “est-il permit d’espérer que les pouvoirs publics, s’il en reste encore des éléments non corrompus par les intérêts particuliers que l’on sait, adressent sérieusement la question de la génération géothermique de base?”
    melenchon semble en faire un des ses combats prioritaires

  6. Vincent Verschoore

    Des bonnes intentions à la réalisation, il y a un fossé rarement franchi. Surtout en face d’intérêts puissants.

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